• 22 juin : visite de Pierre Janet

    22 juin : visite de Pierre JanetÀ la demande de l'intersyndicale, Hervé Morin, président de la région Normandie, est venu visiter l'hôpital psychiatrique Pierre Janet du Havre, vendredi 22 juin à 17h30. J'ai pu me joindre à cette visite et ainsi me rendre compte par moi-même de la situation.

    La visite commence par les urgences psychiatriques. Elle devait être impromptue, mais manifestement, la direction en avait eu vent et 5 lits supplémentaires qui étaient installés là à demeure avaient été enlevés. Là où 17 patients étaient "reçus" la veille dans deux minuscules salles d'attente vétustes, il n'y avait quasiment personne ce vendredi. Hasard ou pas ? Quoi qu'il en soit, et malgré ce calme apparent, le surpeuplement était évident :  Dans la salle de télévision, où 6 chauffeuses servent normalement à accueillir les patients qui veulent se divertir, les 6 chauffeuses en question sont regroupées, en deux rangées de 3 face à face, et servent de support à un matelas. Le reste de l'espace est occupé par un autre matelas à terre. Il n'y a donc plus de salle de télévision.

    C'est à ce moment que la direction et quelques médecins viennent se joindre à la visite. Disons tout de suite qu'hormis la directrice du centre, évidemment prise entre deux feux, les médecins présent-e-s ont plutôt abondé dans le sens des personnels. C'est du moins ce qui est apparu aux yeux de quelqu'un d'extérieur au centre. Manifestement, ce n'est pas tout à fait ainsi que le vivent les personnels, qui ont sans doute des passifs à régler avec leurs équipes de direction.

    La visite s'est poursuivie par l'unité Féroé, unité fermée où sont hospitalisés des détenus. Rappelons que cette unité n'est pas une unité spécialisée (UHSA), qu'elle ne dispose pas du personnel spécifiquement formé, ni en nombre suffisant. D'ailleurs, il est étonnant de voir sur les blouses du personnel le nom d'autres pavillons : Alizée, Boréal, Caravelle... Pourquoi ? Tout simplement parce qu'il s'agit de personnel appelé en renfort pour "boucher les trous" selon leurs propres termes, aux dépens des malades dont ils et elles sont référent-e-s dans leurs pavillons d'origine, et qu'il et elles ne peuvent donc plus suivre.

    C'est ce qui revient comme un leitmotiv dans le discours des personnels : nous ne pouvons plus exercer le métier que nous avons choisi, nous ne pouvons plus rien faire avec les patients, aucune activité, aucun suivi. Nous ne pouvons plus faire ce pourquoi nous avons été formé-e-s : écouter, analyser, parler, guérir.

    Certain-e-s, dont des médecins, n'hésitent pas à dire qu'ils et elles ont l'impression d'être revenus au temps de l'Asile, alors que Janet avait été conçu à l'origine comme un hôpital ouvert et humain.

    Dans le dernier pavillon visité, nous avons pu constater les chambres vétustes, avec deux placards pour trois lits, lits que certains patients, qui bénéficient d'une permission pour aller voir leur famille, par exemple un week-end, ne sont pas sûrs de retrouver le dimanche soir en revenant, car il aura été occupé par quelqu'un d'autre ! surpopulation oblige !

    La visite s'est terminée par un échange avec les 50 personnels présent-e-s dehors, représentant tous les corps de métier : infirmier-e-s, aides-soignant-e-s, administratifs, médecins... Où nous apprenons quelques perles : comme le fait que le personnel doit amener de leur domicile des pastilles de lave-vaisselle, car la dotation ne permet pas d'en acheter ! ou alors que certains jours, il n'y a plus assez de réserves pour les deux repas de la journée...

    Hervé Morin lui-même, pourtant peu suspect de sympathie inconditionnelle envers les luttes sociales, n'a pu que qualifier les conditions de travail d'intolérables, et les conditions d'accueil des patients d'indignes.

    Qu'attend donc l'ARS pour réagir ? Attend-elle, une fois de plus, un durcissement de la lutte comme au Rouvray ? Attend-elle un nouvel accident comme il y en a déjà eu à Janet : suicide de patient, soignantes menacées par un détenu muni d'une barre de fer, agression d'une aide-soignante à la lame de rasoir...

    Les personnels ne veulent plus de ces audits à n'en plus finir qui aboutissent toujours au même constat, mais jamais suivis d'effets. Ils réclament, afin de pouvoir juste faire leur travail :

    - La création d'une unité supplémentaire, avec les postes afférents : 50 postes.

    - L'arrêt de la polyvalence. Rappelons que cette polyvalence ne consiste qu'à changer de pavillon pour boucher les trous !

    - L'arrêt des fermetures de structures extérieures, telles les CMP, ce qui aboutit à envoyer toujours plus de monde vers l'hôpital, alors que les personnes concernées ont des pathologies qui ne le justifient pas.

    - La stagiarisation et la titularisation des personnels contractuels,

    - Augmentation du nombre de personnels administratifs et techniques, indispensables à la bonne prise en charge des activités de soins.

    - 13 postes pour la création d'un Service Infirmier de Compensation et de Suppléance (SICS) de nuit : demande conjointe de la direction et de l'intersyndicale.

    Madame Gardel(1), le temps presse ! Le personnel n'en peut plus et au cours de la visite, nous en avons vu au bord des larmes (photo), ce qui, d'après eux et elles, n'est pas rare. Il est scandaleux que l'on laisse sans réagir quelqu'un venir travailler en pleurant, et en repartir en pleurant !

    Avec le groupe des élu-e-s communistes et du front de gauche au conseil régional, nous avons écrit une lettre à Madame La Ministre pour qu'elle oblige l'ARS à ouvrir une négociation, telle qu'exigée par le personnel, puisque manifestement, la directrice ne commence à bouger que lorsqu'un ordre lui vient de plus haut. Si ce n'est pas la ministre, ce sera la préfète....

     

    (1) Directrice de l'ARS

    photo : © Christophe Frébou, Paris-Normandie

     

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